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Comme je donne un cours sur le recrutement depuis 3 ans déjà, je me suis fait une alerte google sur ce thème.

Et depuis plusieurs mois, j’y trouve des articles traitant de la difficulté rencontrée par des entreprises pour recruter : manque de candidat(e), manque de candidat(e) compétent(e). Dans tous les secteurs, dans tout type d’entreprise.

 

Nous nous souvenons de cette rangaine entonnée par les leaders du MEDEF et de la CGPME et repris par certains chefs d’entreprise, au début du quinquennat du précédent président de la république autour des charges sociales qui, en France, disaient-ils, alourdissaient considérablement le coût du travail et sapaient la compétitivité de leurs sociétés.

Mais depuis, d’abord le CICE, puis le pacte de responsabilité n’ont-ils pas eu justement comme objectif de diminuer drastiquement les charges sociales et impôts - 40 milliards ! - et de restituer des leviers aux entreprises françaises face à leur concurrentes ?

En principe, l’impact sur le chomage devrait se faire sentir.

Pas tellement en fait[1] ; une tendance certes, mais plutôt cahotique : un mois le chomage baisse, le mois suivant il remonte. Combien d’emplois créés ? Loin du million annoncé par le tonitruant Monsieur Gattaz, un peu moins de 600.000 pour 2016/2017. Mais moteur de la croissance ou effet de celle-ci ?

Finalement, le coût du travail a-t-il un si grand impact sur la performance des entreprises ? Pas tant que cela : quand le Ministre de l’économie annonce le report des exonérations de charges en compensation de la suppression du CICE au 1er janvier 2019, le nouveau Président réagit pour la forme, mais il omet de parler de l’impact sur l’emploi[2].

Un certain patronat aurait-il forcé le trait au sujet des charges pour retrouver d’autres marges de manoeuvre (pas pour l’investissement apparemment). Quels sont les vrais bénéficiaires du pacte de responsabilité ?

Du coup, le nouveau refrain repris en chœur par certains patrons d’entreprise, la difficulté à recruter, laisse perplexe, dubitatif.

Pas de personnel compétent ? Et l’apprentissage ou l’alternance, ce merveilleux outil de transmission des savoirs et savoirs faire (en Allemagne ou en Suisse, certainement), qu’en ont-ils fait nos chefs d’entreprise ? Les entrées dans le dispositif ont certes augmenté, mais très raisonnablement[3] depuis 2014 comme si ce problème des compétences n’était pas un enjeu fort de la compétitivité.

Pas très audacieux nos chefs d’entreprise « qui voudraient recruter mais en sont empêchés par le manque de compétences sur le marché du travail », pas très actifs dans ce domaine lié à l’emploi, pas très innovateurs, pas très anticipateurs, pas très agiles, eux qui demandent de plus en plus à leurs salariés de l’être.

Ne rêvons pas non plus, ce n’est pas en diminuant leurs indemnités que les chômeurs vont se sentir motivés par l’emploi : l’image renvoyée par l’entreprise n’est pas excellente. Certes, la notion de travail a toujours été liée à l’idée d’effort, de contrainte, de peine. Mais l’apparition, ces dernières années, dans le champs du social de termes comme risques psycho-sociaux, harcèlement, burn-out ne marque-t-il pas la tendance à la dégradation des rapports et relations humaines au sein de beaucoup d’entreprises ?...Et la courbe des arrêts maladie monte en flèche[4]. Illustrations également d’un fait patent : la plupart des entreprises fonctionnent de façon chronique en situation de sous-emploi, augmentant pour les salariés la charge de travail et l’intensité de celui-ci.

 

Autre signe d’un climat qui se détériore, comme pour donner le change, ces entreprises qui se dotent d’une politique de « bien-être au travail » et façonnent et refaçonnent à l’envi leur « marque employeur »…

Pourquoi ?

Bien sûr, je vous l’accorde, je force le trait, je généralise, et je ne devrais pas. Excusez-moi. Je suis injuste : il existe des entreprises qui anticipent et agissent en matière de formation soit pour ne pas risquer la pénurie de candidat(e)s, soit justement pour répondre à l’évolution de leurs métiers. Cnsultez les medias régionaux, ils fourmillent de cas exemplaires.

Et il existe – beaucoup – d’entreprises où il fait bon travailler !

Mais vraiment, j’ai beaucoup de mal à entendre ces chefs d’entreprise qui s’épanchent à longueur de media sur leur prétendues difficulter à recruter.

Surtout quand ils évoquent les travailleurs migrants comme solutions à leur difficultés : pourquoi pensez-vous qu’ils soient prêts à embaucher des migrants ? Juste parce qu’ils les paieront moins chers et qu’ils les imaginent dociles[5].

 

 Bertrand Lumineau

 [1] 9,1% au second trimestre 2018 au sens du chomage BIT (soit 2,5 millions de  personnes in https://www.insee.fr/fr/statistiques/3598305 v/ 9,9% en 2014 (soit 2,8 millions de personnes in :

https://www.insee.fr/fr/statistiques/1906672?sommaire=1906743

[2]  «L'angle mort de la politique du gouvernement, c'est la réduction des dépenses publiques. Comme cela n'est pas fait, au dernier moment, on fait de la tambouille comptable», Geoffroy Roux de Bézieux cité par Le Figaro  28/08/18

[3] A  noter qu’à l’instant « T » soit en 2018, le nombre d’apprentis est inférieur à celui de la période 2011-2013 : https://www.alternance-professionnelle.fr/apprentissage-effectifs-augmenter/

[4] Les dépenses totales d'indemnités journalières = +19 % sur la période 2010-2017, et +5,3% de 08/17 à 07/18 en données brute) pour atteindre 10,6 milliards d'euros de 08/17 à 07/18. Source CNAM

[5]  Consulter https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/metiers/restauration-hotellerie-sports-loisirs/emploi-de-migrants-dans-la-restauration-nous-avons-besoin-de-personnel-que-nous-n-avons-pas-en-france_2884807.html

Le conflit salarial en cours chez Air France est exemplaire à  plus d'un titre. Conflit classique, sur la question salariale. Mais premier conflit d’ampleur depuis l’adoption des ordonnances censées bouleverser l’ordre juridique dans les entreprises.

Rappelons les faits :

Après un blocage des salaires depuis 2011, les organisations syndicales demandent - exigent serait le terme approprié - une augmentation générale de 6% dès 2018 (et 4,7% en plus pour les pilotes).

 

Paradoxe : en février de cette année, la direction a signé un accord salarial, mais avec 2 syndicats seulement, qui plus est minoritaires1, la CFDT et la CFE-CGC CGE.

Les autres syndicats, formant une intersyndicale majoritaire, ont fait jouer leur droit d’opposition à cet accord comme le prévoit le code du Travailet exigent depuis lors une augmentation de 6% au titre de compensation de l'inflation depuis 2011.

Nous en sommes maintenant à 11 ou 12 journées de grève et d’autres sont annoncées.

La direction a tardé à réengager des négociations, semblant vouloir s'adresser dans un premier temps uniquement aux pilotes.

 

Sans chercher à savoir si la revendication est juste, ou si la réponse de la Direction est cohérente, quelques réflexions :

¨       Cette fois-ci, toutes les catégories sont sur le pont. Pour la plupart, les salariés ont accepté des sacrifices au titre des plans de restructuration précédents. Mais, les résultats s’améliorant, ils estiment qu’il existe du « grain à moudre » en terme de salaire au nom du concept de « retour à bonne fortune »

¨       La direction prétend que les salaires n'ont pas stagné pendant la période de gel : les primes « exceptionnelles », les augmentations automatiques dues à l'ancienneté dans l'entreprise ou dans le poste, les promotions, ont continué. C'est sans doute vrai. Mais ces mesures ont beaucoup moins d'impact qu’une augmentation générale, elles ne sont pas négociées, elles résultent d’accords déjà signés, elles sont individuelles, donc opaques ou invisibles

La direction a pris un triple risque :

- en méconnaissant l’importance du salaire pour les salariés, surtout dans une entreprise au sein de laquelle les salaires connaissent une très forte disparité3

- en pensant qu’un accord minoritaire allait suffire à faire partager sa conviction : même si les résultats 2016 et 2017 sont bons, il faut encore continuer à mener une politique rigoureuse de la masse salariale pour préserver ces résultats et les améliorer encore, de manière à consolider la compétitivité d’Air France et en assurer  développement et pérennité

- en ne rouvrant pas la négociation dès l'opposition des syndicats majoritaires. Certes, elle ne voulait pas désavouer les syndicats signataires. Mais puisqu’il y avait opposition des majoritaires, l'accord n'était pas valide, elle était légitime à rouvrir à négociation. Sans attendre, pour ne pas négocier sous la contrainte, les jours de grève et les pertes sèches pour l'entreprise risquant de s'accumuler – ce qui en train de se passer

Risque encore plus grand peut-être : rouvrir finalement la négociation4, quitte à perdre en crédibilité : ou bien il y avait des espaces de négociation possible, et ce, dès février, ou il n'y en avait pas, et du coup, il ne fallait pas reprendre la négociation. Position intenable, signe de flottement de la direction. L’annonce du référendum au contour juridique contestable, et sa mise en scène, aurait pu, à court terme, permettre à la direction de s’en sortir, mais très provisoirement : finalement là encore, la direction a été prise à contre-pied.

Facile à dire, direz-vous. Oui. Mais dans une négociation, il ne faut jamais perdre de vue le plan B, on ne sait jamais vraiment comment les choses vont tourner. Surtout chez Air France, n'oublions pas ces images d'octobre 2015, révélatrices d'une société au bord du crash social.

 

Et sur le sujet éminemment sensible de la réforme du ferroviaire, les deux acteurs, gouvernement d'un côté, syndicats de l'autre, seraient bien avisés d'en tirer les leçons au lieu de se draper dans leur quant à soi en affirmant "Nous irons jusqu'au bout !"

Il ne s'agit pas aujourd'hui d'autre chose que de trouver un compromis, qui, le moment venu, pourra être remis en cause. Ne l'oublions pas, rien n'est jamais figé de toute éternité : les compagnies ferroviaires ont été nationalisées en 1938 parce qu'elles perdaient de l'argent. Et même les trains, demain, n'auront plus besoin de conducteurs, comme, déjà, le metro, ou les avions, de pilotes...

 

Bertrand LUMINEAU



[1] C’est à dire ayant obtenu moins de 50% aux dernières élections au Comité d’entreprise (elles ont obtenu, à elles 2, 31,1% des suffrages exprimés). A noter que la loi El Khomri a inversé la règle : l’accord est valide s’il est signé par un ou plusieurs syndicats ayant obtenu moins de 50% aux dernières élections au Comité d’entreprise. Sauf qu’en matière de négociation salariale cette règle ne sera applicable qu’au 1er janvier 2019. La direction d’Air France aurait été avisée d’anticiper...

[2]  s'ils ont obtenu plus de 50% des suffrages exprimés au premier tour des élections du Comité d’entreprise

[3] https://www.la-croix.com/Economie/France/gagne-combien-chez-Air-France-2018-03-30-1200928105

[4] Le 10 avril, soit 2 mois après l’opposition des syndicats majoritaire à l’accord signé par les minoritaires !

 

***

 A propos du référendum :

Si le référendum organisé par la Direction d’Air France a rendu un verdict clair,contre les propositions salariales de la direction, le mouvement de grève organisé par l’intersyndicale rend également un verdict clair, de jour de grève en jour de grève :

Et ce verdict est celui-ci : si 55,44% des salariés ont rejeté les propositions salariales de la direction le 4 mai, ils ont été 85,8% des pilotes et 81,9% pour les personnels au sol à refuser de s’associer au mot d’ordre de grève de l’intersyndicale le 7 mai.

Monsieur Janaillac, PDV d’Air France, a démissionné. Ne pourrait-on pas attendre une démission des présidents et/ou secrétaires généraux des syndicats regroupés dans l’intersyndicale dans la mesure où la plus grande partie du personnel ne suit plus les mots d’ordre de grève de celle-ci ?

 

Je ne suis pas un spécialiste de l'économie, ni du politique, mais je trouve intéressant le débat engagé autour du revenu universel parce qu'au centre de ce débat, il y a la question de la pauvreté, avec tout ce qu'elle charrie de souffrance, d'exclusion, d'injustice.

Lutter contre la pauvreté et chercher à l’éradiquer me paraissent une cause juste.

Toutefois, au sujet du revenu universel, je me pose quelques questions :

- de quelle pauvreté parle-t-on ? la pauvreté monétaire ?

- à combien d’euros par mois commence-t-elle ? 500 €, 700 €, 800 € ?

- sur quel territoire le revenu universel se déploiera-t-il ?

Ce revenu est-il une réponse à l’augmentation inexorable du chômage que prédisent certains ?

Certes, en France et dans certains pays du Sud de l’Europe, le taux de chômage atteint un niveau inquiétant et pérenne. Mais est-ce dû à une soi-disant raréfaction du travail, qui, elle, serait due à la robotisation et aux algorithmes ?

Dans les pays de l'Europe du Nord, en Allemagne, aux USA, qui vivent  la même révolution numérique, le chômage est beaucoup plus limité.

Autre point qui peut faire question : si la société attribue aux citoyens un "revenu",  faut-il exiger une contrepartie à ce revenu ? Si oui, de quelle nature ? A quoi devra ressembler cette contrepartie ? Dans quel secteur de la vie de la société interviendrait-t-elle ?

Et si le revenu universel doit entraîner une diminution de ceux et celles qui chercheront un travail, est-il sûr que le partage du temps de travail soit également une réponse opportune au chômage ? N'a-t-on pas fait une telle expérience en France, il n’y a pas si longtemps, en instaurant les 35 heures (diminution de 11% du temps de travail) sans conséquence durable (et même immédiat) sur l'emploi ? 

Enfin ne serait-il pas temps de s'interroger sur la réintégration dans le concept travail d'une série d'activités qui en sont exclues : travail des enfants à l' école, des jeunes au collège ou en lycée, travaux domestiques (travail quand une personne extérieure à la famille s'y colle, mais non travail quand c'est un membre de la famille qui le fait, la femme le plus souvent), travail d’accompagnement des aidants, travail réalisé bénévolement*. Sans compter toutes les tâches que les organisations ou les entreprises toujours plus numérisées abandonnent aux usagers ou aux clients quand autrefois leurs salariés s’en chargeaient en étant payés. 

Peut-on envisager de rémunérer ce travail ?

 

Et pour rassurer les angoissés de la révolution numérique, l'autre jour, j'entendais un dirigeant d'une mutuelle expliquer comment l'algorithme avait permis de réorganiser l'entreprise en automatisant le travail de liquidation de dossiers et en redéployant les salariés vers des activités d'écoute, de conseils, de services : n'y aurait-il pas là une piste d'amélioration du service, de la qualité, et concomitamment, de l’emploi ?

Depuis la fin des 30 glorieuses, les entreprises passent leur temps à diminuer les effectifs pour gagner en compétitivité. Le résultat est clair : il n’a jamais été autant question de la souffrance au travail, le travail s’est déshumanisé, il a perdu de son sens… (Et le passage aux 35 heures n’a rien arrangé, les entreprises se refusant à embaucher pour compenser le temps disparu puisque le salaire était maintenu, accentuant encore la pression sur leurs salariés).

D'où cette idée, que les entreprises se réorganisent, se restructurent, cette fois en embauchant pour ramener un peu de qualité  dans la vie au travail, et faire tomber la pression, dissoudre les tensions...Cela n’aurait-il pas plus de sens que de se doter de Chiefs Officer Happiness ?

 

Sauf qu'attendre cela des mêmes entreprises qui ont bénéficié de 40 milliards de charges sans contrepartie, c'est sans doute aussi une belle utopie....

 

Bertrand Lumineau

*et notamment celui fait par la multitude des délégués syndicaux de toute obédience, dont il ne faut pas, du coup, se plaindre s'ils ne sont pas vraiment "professionnels" dans leur pratique ?

  

Je ne suis pas un spécialiste de l'économie, ni du politique, mais je trouve intéressant le débat engagé autour du revenu universel parce qu'au centre de ce débat, il y a la question de la pauvreté, avec tout ce qu'elle charrie de souffrance, d'exclusion, d'injustice.

Lutter contre la pauvreté et chercher à l’éradiquer me paraissent une cause juste.

Toutefois, au sujet du revenu universel, je me pose quelques questions :

- de quelle pauvreté parle-t-on ? la pauvreté monétaire ?

- à combien d’euros par mois commence-t-elle ? 500 €, 700 €, 800 € ?

- sur quel territoire le revenu universel se déploiera-t-il ?

Ce revenu est-il une réponse à l’augmentation inexorable du chômage que prédisent certains ?

Certes, en France et dans certains pays du Sud de l’Europe, le taux de chômage atteint un niveau inquiétant et pérenne. Mais est-ce dû à une soi-disant raréfaction du travail, qui, elle, serait due à la robotisation et aux algorithmes ?

Dans les pays de l'Europe du Nord, en Allemagne, aux USA, qui vivent  la même révolution numérique, le chômage est beaucoup plus limité.

Autre point qui peut faire question : si la société attribue aux citoyens un "revenu",  faut-il exiger une contrepartie à ce revenu ? Si oui, de quelle nature ? A quoi devra ressembler cette contrepartie ? Dans quel secteur de la vie de la société interviendrait-t-elle ?

Et si le revenu universel doit entraîner une diminution de ceux et celles qui chercheront un travail, est-il sûr que le partage du temps de travail soit également une réponse opportune au chômage ? N'a-t-on pas fait une telle expérience en France, il n’y a pas si longtemps, en instaurant les 35 heures (diminution de 11% du temps de travail) sans conséquence durable (et même immédiat) sur l'emploi ? 

Enfin ne serait-il pas temps de s'interroger sur la réintégration dans le concept travail d'une série d'activités qui en sont exclues : travail des enfants à l' école, des jeunes au collège ou en lycée, travaux domestiques (travail quand une personne extérieure à la famille s'y colle, mais non travail quand c'est un membre de la famille qui le fait, la femme le plus souvent), travail d’accompagnement des aidants, travail réalisé bénévolement*. Sans compter toutes les tâches que les organisations ou les entreprises toujours plus numérisées abandonnent aux usagers ou aux clients quand autrefois leurs salariés s’en chargeaient en étant payés. 

Peut-on envisager de rémunérer ce travail ?

 

Et pour rassurer les angoissés de la révolution numérique, l'autre jour, j'entendais un dirigeant d'une mutuelle expliquer comment l'algorithme avait permis de réorganiser l'entreprise en automatisant le travail de liquidation de dossiers et en redéployant les salariés vers des activités d'écoute, de conseils, de services : n'y aurait-il pas là une piste d'amélioration du service, de la qualité, et concomitamment, de l’emploi ?

Depuis la fin des 30 glorieuses, les entreprises passent leur temps à diminuer les effectifs pour gagner en compétitivité. Le résultat est clair : il n’a jamais été autant question de la souffrance au travail, le travail s’est déshumanisé, il a perdu de son sens… (Et le passage aux 35 heures n’a rien arrangé, les entreprises se refusant à embaucher pour compenser le temps disparu puisque le salaire était maintenu, accentuant encore la pression sur leurs salariés).

D'où cette idée, que les entreprises se réorganisent, se restructurent, cette fois en embauchant pour ramener un peu de qualité  dans la vie au travail, et faire tomber la pression, dissoudre les tensions...Cela n’aurait-il pas plus de sens que de se doter de Chiefs Officer Happiness ?

 

Sauf qu'attendre cela des mêmes entreprises qui ont bénéficié de 40 milliards de charges sans contrepartie, c'est sans doute aussi une belle utopie....

 

Bertrand Lumineau

*et notamment celui fait par la multitude des délégués syndicaux de toute obédience, dont il ne faut pas, du coup, se plaindre s'ils ne sont pas vraiment "professionnels" dans leur pratique ?

  

Comment lutter comment la discrimination ?

dimanche, 18 décembre 2016 21:45

Pour lutter contre les discriminations de toutes sortes, pas besoin de faire une loi qui va s'ajouter à une loi, qui elle-même va s'ajouter à une loi plus ancienne, qui elle-même.....Bien, vous avez compris de quel pays il s'agit...

Chez Microsoft, la Direction a décidé de prendre le taureau par les cornes : le bonus des responsables sera dorénavant lié aux progrès réalisés pour améliorer la diversité sociale.

Bien sûr, cette mesure pourrait être détournée, donc d'autres mesures soont prévues : amélioration des offres d'opportunités de carrières intéressantes pour les femmes et les minorités, formations internes sur les pratiques d'embauche inclusives ou la prise de conscience des préjugés, campagnes de recrutement visant des personnes d'origines variées, poursuite d'investissements dans l'éducation.

Tel est le programme rapporté par le Parisien dans son édition en ligne du 18 novembre dernier.*

*http://www.leparisien.fr/high-tech/microsoft-les-bonus-des-responsables-lies-a-la-diversite-sociale-18-11-2016-6344247.php

 

 

 

Rappelons-nous, le 7 septembre dernier, tombe une dépêche AFP, aussitôt reprise par l’ensemble des medias : Alstom1  va arrêter, d'ici à 2018, la production de trains sur son site de Belfort. Cette activité, ainsi que l'ingénierie, sera transférée sur l’usine de Reichshoffen, dans le Bas-Rhin.  Resteront à Belfort 80 postes, les 400 autres salariés se verront proposer un transfert vers les sites d'Alstom en France. Raison invoquée : une chute de 30 % des commandes d'ici à 2018.

Comme l’écrit Le Monde2 le lendemain  : « Salariés et syndicats balancent entre sidération, inquiétude et colère après l’annonce ». 

MM. Sapin et Sirugue3   convoquent d’urgence à Paris le PDG d’Alstom, Henri Poupart-Lafarge4 , pour lui faire part « de leur incompréhension du caractère soudain et non concerté de cette annonce5 » .

Deux lignes du Figaro résument la situation :  «Colère et sentiment de «trahison» des citoyens et élus locaux, réunion de crise à l'Élysée, agitations et commentaires acerbes de politiques toutes part6» .

***

Moins d’un mois plus tard, après un suspense à couper au couteau, Alstom Belfort est sauvé, l’Etat va commander 15 TGV à Alstom, la SNCF va acheter six rames TGV et commander 20 locomotives dépanneuses, et Alstom elle-même va investir pour faire de Belfort un centre de maintenance.

Certes, les 15 TGV vont être affectés au réseau  Intercités - notamment aux lignes Bordeaux-Marseille et Montpellier-Perpignan - et ne rouleront pas au maximum de leur vitesse. C’est complètement ridicule, mais l’usine Alstom de Belfort survivra et les compétences seront préservées ; c’est bien là l’essentiel, n’est-ce pas ?

***

Sauf qu’on nous a sans doute raconté une belle histoire, une histoire à connotation sociale, 400 salariés ultra compétents ne seront pas obligés de déménager à Reichshoffen (ou ailleurs), et leur savoir-faire sera préservé pour être utilisé lors de la mise en chantier du TGV du futur à l’aube des années 2020 !

-Mais beaucoup de ces experts ont déjà quitté l’usine de Belfort et Alstom – ils étaient 1400 en 1990 ! – sans alarmer personne. Et d’autres partiront encore avant la mise en chantier des TGV du futur vers 2020/2021. 

D’ailleurs cette « expertise » TGV sera-t-elle bien utile pour construire les TGV du futur ?

-Reprenons : l’annonce du 7 septembre 2016 a été faite à l’usine de Belfort, de façon tout à fait informelle, par convocation des délégués syndicaux du site par la direction, puis par la tenue de réunions par petits groupes des salariés du site le même jour… 

Quand elle aurait dû l’être au Comité Central Entreprise d’Alstom puisqu’elle concernait l’ensemble des sites français qui avaient vocation à accueillir les salariés reclassés de Belfort.

Mais aucune plainte de l’Inspection de travail n’a été déposée, et aucun leader syndical, local ou national,  n’a trouvé à redire sur la procédure d’information du personnel 7.

Curieuse timidité de la part d’un monde syndical encore chauffé à blanc par la loi El Khomri, non ?

-Et si nous revenons deux ans en arrière : le délégué de la CFDT, Olivier Kohler est interviewé dans le Monde du 18 décembre 20148 . Que dit-il ?

« Les salariés sont à la fois inquiets et fatalistes » résume Olivier Kohler. « Pour le moment, il fait encore beau, mais on attend l’orage. »

A Belfort, la Traction peut-elle être viable avec deux fois moins de salariés ? « On pense que non », poursuit le syndicaliste. « La perte de savoir-faire et de compétences serait telle qu’on ne serait plus en mesure de répondre à des appels d’offres pour les types de machines que l’on produit aujourd’hui. La direction a, semble-t-il la volonté de modifier notre outil industriel : l’établissement ne fabriquerait plus du matériel neuf, mais se spécialiserait dans la maintenance, la réparation, la remise aux normes. Entre 50 et 150 personnes suffiraient alors. »

En deux mots, Kohler savait déjà ce qui allait se passer à Belfort près de 2 ans plus tard. Et il avouait que la soi-disant compétence inestimable des salariés du site n’existe plus. 

***

Tout sauf une surprise cette annonce du 7 septembre !

Mais les medias ont tous marché comme un seul homme. 

Sauf que nous ne sommes pas forcés de croire à ce qui ressemble aujourd’hui9  à une petite manipulation. 

Bertrand Lumineau

1Alstom qui vient d’annoncer, fin août, une commande de 28 trains à grande vitesse pour l'Américain Amtrack, et vient d’être choisi par la SNCF comme partenaire pour la conception d’un nouveau train à grande vitesse.

2http://www.lemonde.fr/economie-francaise/article/2016/09/08/pour-les-ouvriers-alstom-de-belfort-c-est-un-gros-coup-de-massue_4994505_1656968.html

3Ministres, mais qui affirment tomber des nues. Pourtant, l’Etat siège au Conseil d’Alstom depuis la vente de 70% de l’activité de la société à General Electric en 2014 : Bouygues a prêté ses actions à l’Etat.

4Henri Poupart-Lafarge, polytechnicien, comme son prédécesseur, Monsieur Kron. Mais lui a fait les Ponts, quand son prédécesseur a fait les Mines.

5http://www.lemonde.fr/economie-francaise/article/2016/09/08/pour-les-ouvriers-alstom-de-belfort-c-est-un-gros-coup-de-massue_4994505_1656968.html

6http://www.lefigaro.fr/economie/le-scan-eco/explicateur/2016/09/12/29004-20160912ARTFIG00262-alstom-ce-qu-il-faut-savoir-pour-comprendre-la-crise.php

7Personne, ni media, ni personnel politique ne s’est posé de questions sur cette procédure « atypique »…

8http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/12/18/rep-a-belfort-le-spleen-de-la-traction_4542809_3234.html

9Alstom aurait des visées sur Thalès…

 

Vous êtes  le maître de monde (enfin presque, vous êtes à la tête d’un empire, appelons-le 3Z – valant plusieurs milliards- acheté à crédit), vous voulez vous développer –encore-, à crédit –toujours- vous jetez votre dévolu sur une nouvelle société – appelons-la 4SSS - , bien sûr, d’autres groupes ont envie de 4SSS, notamment le groupe 5BBB.
 "Les entreprises 3Z et 4SSS sont complémentaires. Nous allons associer deux entreprises à forte dynamique pour un projet de croissance",
expliquez-vous aux media, et vous ajoutez que vous ne procéderez « à aucun licenciement collectif économique du fait de la rationalisation de structure des entreprises concernées par la cession.»
Le PDG du groupe vendeur –4SSS- explique pourquoi il a choisi votre groupe, 3Z :
« 5BBB et 4SSS font des métiers très proches. Il y aurait eu 4000 à 6000 personnes en trop, sans compter les sous-traitants. La situation aurait été difficile à gérer, alors même que 5BBB s'était engagé à ne pas licencier pendant trois ans."
Pour enlever le morceau d’ailleurs, vous n’avez pas été avare d’engagements, notamment en matière d’emploi, vous signez un accord avec le gouvernement, garantissant un maintien de l’effectif pendant 3 ans.
24 mois plus tard, vous annoncez que le nouveau groupe est en sureffectif, 5000 emplois en trop,
Mais, dites-vous,
"Les gens ont horreur des chefs d'entreprise qui font de la politique, qui ne disent pas ce qu'ils vont faire, qui font semblant. Quand on parle à quelqu'un, si on lui dit les choses dès le début ça se passe très bien".
Le manager de choc que vous avez engagé1  développe vos propos quelques jours plus tard, les engagements seront tenus mais la garantie de maintien de l'emploi est, dit-il, une "situation inédite, frustrante pour les salariés et [...] pénalisante pour l'entreprise", il compte bien la corriger. Et vite, dès la fin de cette période du gel des emplois (3 ans). Cette restructuration est nécessaire, le "marché est très difficile", le groupe doit garder sa compétitivité, "des adaptations seront nécessaires".
Pour illustrer les difficultés rencontrées, un résultat net semestriel négatif est annoncé.
Dans la foulée, un plan de départs – volontaires - est conclu avec certaines organisations syndicales, plan résolument généreux, coût annoncé entre 600 et 800 millions d’euros, soit de 120.000 à 160.000 euros par salarié.
Oui, bien sûr, vous avez reconnu l’histoire de la fusion Numericable-SFR, avec Messieurs DRAHI et COMBES dans le rôle des acteurs principaux.
Précisions :
- le prétendu engagement de 3 ans court depuis la mi-2014, et non depuis la date de fusion effective de Numericable et de SFR, novembre 2014. Donc il s’agit d’un engagement réel de 30 mois et non 36.
- à l’origine, l’effectif de SFR était de 9000 salariés, et celui de Numéricable, de 2000. Aujourd’hui, l’effectif du groupe serait de 14.500 salariés2 , mais le prix à payer pour l’ensemble originel SFR-Numéricâble3  sera de 4000 emplois en moins. Et Monsieur Fourtou, PDG de SFR, expliquait qu’en termes d’emploi, le prix d’une vente à Bouygues aurait été trop coûteuse, de 4000 à 6000 emploi !
En tout état de cause le résultat semestriel négatif annoncé est principalement dû à des coûts exceptionnels liés au refinancement majeur intervenu en avril 2016 (221 millions d’euros). Hors l’impact de ce refinancement, le résultat net aurait été positif à +178 millions d’euros4 .
Petit rappel, Monsieur COMBES est le « sauveur » de la société ALCATEL qui était malade. Mais l’a-t-il sauvée ou vendue ? Ce qui est sûr, c’est qu’il a supprimé un quart de l’effectif mondial, soit 20.000 postes 5.
Donc un expert, mais pas forcément en matière de business, ni de management, ni de gouvernance.
Nous attendons les réactions imminentes de Messieurs GATTAZ6 , très emmêlé dans les affaires de représentativité du MEDEF, et contrarié par son opposition interne, de Messieurs MARTINEZ et MAILLY 7, BERGER et BERILLE 8, HOMMERIL, le nouveau secrétaire de la CFE-CGC.

 

 Bertrand LUMINEAU

 Citations du début du texte :
http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/rachat-de-sfr-par-numericable-une-bonne-nouvelle-pour-l-emploi-et-les-clients_1506834.html
http://www.generation-nt.com/sfr-operateur-michel-combes-sureffectif-correction-actualite-1930537.html

 1Pour faire jouer les synergies (sic)
2Par intégration de filiales, notamment de distribution.
3Sociétés qualifiées de « complémentaires » par Monsieur DRAHI lui-même avant la fusion
4Voir communiqué de presse du 6/08/2016, « Résultats du 2ème semestre 2016 ».
5Et d’engranger au passage 13,7 millions de bonus à titre personnel. Somme ramenée à 8 millions seulement, certains esprits malveillants ayant mis en doute la validité juridique et le bienfondé de ce bonus.
6Très emmêlé dans la question de la représentativité du MEDEF,
7Sans doute en train de se ressourcer après leurs randonnées épuisantes dans les rues de Paris au printemps.
8Dont le syndicat interne Numericable-SFR a signé le plan de départs – volontaires -…

 

 

 

Pas sûr que la loi El Khomri soit si désavantageuse que cela pour les salariés.

Expliquons-nous.

En France, nous vivons avec une conception de la loi du travail comme protectrice des salariés. 

Oui, sans doute, pendant toute une période allant des débuts de l’industrialisation jusqu'à la fin des 30 glorieuses, voire un peu au-delà, le législateur a desserré l’étau comprimant la vie au travail du salarié en France.

Mais depuis, cette loi a-t-elle bien continué à jouer ce rôle. Ou alors de quelle protection parle-ton et pour qui ?

Depuis les 35 heures et les 5 semaines de congés, jamais le nombre de licenciements n’a été plus important, jamais le nombre de chômeurs n'a été si grand 2.

Qui peut dire honnêtement que la loi a empêché les licenciements dits boursiers ? Les délocalisations ? Ou le dépeçage de certaines grandes entreprises françaises (Alstom, Alcatel, Lafarge pour ne citer que les dernières en date) pour des raisons pas toujours très claires, et pour le plus grand profit des actionnaires .  

Oui, nous avons entendu parler de luttes, parfois violentes, nous en avons vu les images. Et après ? Qui a gagné ? Qui a perdu ?

Oui, il y a eu des luttes, des combats, mais d'arrière-garde, tous perdus inexorablement par les salariés, menés souvent par leurs représentants s'imaginant chaque fois rejouer un épisode de la lutte des classes.

Un droit du travail protecteur ? Mais faut-il méconnaître à ce point la réalité de l'entreprise ? Qu’en pensent les 5 millions de chômeurs ? Qu’en pensent la majorité des femmes salariées de ce pays toujours allègrement discriminées quand les textes de loi sur l’égalité Hommes-Femmes s’empilent ? Qu’en pensent les jeunes (notamment celles et ceux issus de la « diversité »), premières victimes du chômage mais qui payeront la dette garante des « droits acquis » de leurs aînés ? Qu’en pensent  les travailleurs touchés par le handicap ? Qu’en pensent les stagiaires ?

En réalité, les salariés français bercés par la vision d'un droit du travail protecteur (quand il n'est que complexe) ont peu à peu déserté le champ du débat social, voire de la lutte sociale, à un moment où les antagonismes sociaux n’ont pas cessé de s’intensifier, et ils ont été impuissants à agir en matière d’emploi, de salaire, d’organisation, de pouvoir.

Et leurs organisations arc-boutées sur une représentation défensive de la réalité de l’entreprise selon laquelle droits acquis  et progrès social vont de pair, n'ont pas peu contribué au démantèlement de leurs propres forces : aujourd’hui le taux de syndicalisation dans le secteur privé plafonne à peine à 8% au plan national : peut-on encore parler de leur « représentativité»  ?

Alors un projet de loi régressive  ? C’est vrai, sur un certain nombre de points, elle marque une remise en cause de la loi actuelle, notamment sur la durée du travail…

Mais si cette loi avait pour conséquence de sortir les salariés de leur passivité ? Après tout, demain ils détiendront le pouvoir de discuter avec leur employeur dans l’entreprise, en face à face, et d’aborder certains sujets, aujourd’hui confisqués par le législateur ou les apparatchiks des branches professionnelles. 

Du coup, le champ du débat social, de la lutte sociale, ne va-t-il pas se ré-ouvrir, se réanimer pour une meilleure régulation sociale, c’est-à-dire plus équilibrée ? Pour le plus grand profit des salariés, de l’entreprise, des citoyens ? 

 

Bertrand Lumineau

 

[1] Lire « Rôles de zèbres » de Virgil Scurv , http://www.bestiaire-intime.org/home.

[2] Et sur le lieu de travail nous avons même  constaté l’apparition d’une menace nouvelle, le RPS, affectant santé physique ou mentale d'un nombre croissant de salariés, de plus en plus exposés au burn-out, et même au bore-tout. 

[3] Et de certains dirigeants, n’est-ce pas messieurs Kron, Combes Laffond ?

[4] Droits acquis, mais souvent à crédit, rappelons-nous les déficits abyssaux de certaines institutions, la dette que les jeunes générations vont devoir honorer.

[5] Idem en matière de représentativité patronale, qui ne sert qu’à maintenir les situations de certains. 

[6] ayant relu récemment « Germinal » d'Emile Zola (1885), nous nous éviterons néanmoins le ridicule de prétendre que cette loi nous fait revenir au XIX° siècle.ngue (ou très longue) durée, ceux-ci étant ensuite indemnisés par l’UNEDIC, donc, en partie, par les salariés eux-mêmes. Solution de facilité utilisée par toutes les entreprises, en mal de compétitivité ou non.

 

Mon idée première en commençant la rédaction de cette rubrique était d’aborder la question des indemnités de chômage que le gouvernement, de manière insistante, prétend vouloir rendre dégressives. Sauf que, dans ce domaine, le politique n’a pas droit au chapitre : le fonctionnement du système d'indemnisation dépend d'un mécanisme franco-français, le paritarisme. C'est à dire que les conditions d'indemnisation et le montant de celle-ci sont fixés par les «  partenaires sociaux », soit les organisations syndicales patronales et salariales. En clair, le déficit abyssal 1  de ce régime est dû aux décisions de ces organisations, dont le Medef, cette organisation si prompte à exiger des autres –et de l’Etat en particulier - des mesures de baisse des charges sociales. Que ne commence-t-il par montrer l'exemple, serions-nous tentés de dire à ses représentants 2

Et c’est bien le message que lui adresse le gouvernement, « Vous nous demandez des efforts, nous en faisons en allégeant les charges, mais il ne se passe rien sur le front du chômage, vous réclamez à cor et à cris la suppression du CDI, la dissolution du Code du travail, la disparition des 35 heures, etc… Et si maintenant vous vous y mettiez aussi au lieu de toujours tout demander aux autres ? ».

 Bon, tout le monde sait que le chômage de longue durée n’est pas soluble dans la dégressivité des indemnités, rien ne vaut un salaire et un emploi. Le vrai problème c'est bien le travail, ou sa raréfaction.

Restent 29 milliards de déficit de l’UNEDIC qui ne sont pas perdus pour tout le monde : ce régime a aussi permis depuis la nuit des temps 3 aux entreprises de se restructurer, pardon, de se redéployer au nom du concept – à géométrie variable - de « sauvegarde de compétitivité » ; et de licencier notamment les salariés de plus de 55 ans, futurs chômeurs de longue (ou très longue) durée, ceux-ci étant ensuite indemnisés par l’UNEDIC, donc, en partie, par les salariés eux-mêmes. Solution de facilité utilisée par toutes les entreprises, en mal de compétitivité ou non.

Bon, à suivre.

Mais finalement, plutôt que de vous parler de ce thème, toujours très anxiogène, je vais juste vous entretenir d’un petit film que j’ai vu récemment. Son titre : « Demain ».

Je vous livre le résumé emprunté sur le site du film :

« Alors que l’humanité est menacée par l’effondrement des écosystèmes, Cyril, Mélanie, Alexandre, Laurent, Raphäel et Antoine, tous trentenaires, partent explorer le monde en quête de solutions capables de sauver leurs enfants et, à travers eux, la nouvelle génération. A partir des expériences les plus abouties dans tous les domaines (agriculture, énergie, habitat, économie, éducation, démocratie...), ils vont tenter de reconstituer le puzzle qui permettra de construire une autre histoire de l’avenir. »

Pour tourner leur documentaire, ces jeunes gens ont juste mobilisé leurs amis sur Kisskissbank, et ils ont obtenu les fonds nécessaires : pas de recours aux banquiers ou financeurs traditionnels à ce type de production.

Et c’est passionnant, croyez-le, des gens optimistes, qui ne passent pas leur temps à avoir peur, ni à demander de l’aide, des gens qui bougent, innovent, s’inventent de nouvelles vies, de nouvelles façons d’agir, de cultiver la terre, de produire, de faire du business, d’acheter, de vendre, tout en respectant la planète, ils sont drôles (ah ce banquier suisse !), inventifs,  ils ont le sourire, ils donnent envie d’agir, en fait. 

Evidemment, je n’ai pas lu ou entendu beaucoup de commentaires sur ce film qui traite de sujets éminemment sérieux sans se prendre au sérieux. Courez-y, allez le voir. 

Plus tard, nous reparlerons de la négociation chômage, ou de l’extraordinaire volte-face des dirigeants d’Air France dans leur manière de dialoguer avec leurs salariés.

 

29,4 Md d’euros de déficit cumulé fin 2016 d’après une prévision du bureau de l’UNEDIC le 20/10/2015

Même si la manœuvre n’est pas si simple puisqu’il doit négocier avec les organisations de salariés, et sous le contrôle de l’Etat qui n’est jamais très loin, puisqu’il doit donner son agrément pour qu’une convention s’applique.

Au moins depuis la fin des 30 glorieuses, ou depuis le premier choc pétrolier

 

De l’anxiété du chef d’entreprise devant le chômage et du traitement à lui administrer

L’affaire SMART apporte un éclairage nouveau sur les relations de travail à l’intérieur de l’entreprise.

Rappelons les faits : la direction de  SMART veut augmenter le temps de travail de salariés de son usine de Hambach et augmenter l’horaire collectif hebdomadaire de 35 à 39 heures, qui seraient payées 37 ; donc une augmentation de salaire de 6% pour les salariés pour une augmentation du temps de travail de 11,4%. La contrepartie est de sanctuariser les effectifs sur 5 ans.

La direction organise un référendum, la majorité des salariés se prononce en faveur de la réorganisation proposée, mais le collège des ouvriers se prononce contre.

Une négociation s’engage, 2 syndicats minoritaires signent, mais les syndicats CGT et CFDT s’opposent à cet accord, la loi leur en donne la possibilité puisqu’ils représentent + 50% des suffrages exprimés aux dernières élections.

Du coup, la Direction change de tactique et propose aux salariés une modification de leur contrat de travail. Et 97% de ces salariés acceptent la modification. L’histoire ne dit pas ce qu’il adviendra des 3% qui n’ont pas signé l’avenant.

Certes, cette affaire a un petit relent de chantage à l’emploi – mais en ces temps de chômage croissant inexorablement, où l’emploi est devenu la valeur suprême, pourquoi s’en priver ? Et d’autres, sur d’autres estrades s’en servent sans état d’âme pour réclamer à cor et à cris la disparition du code du travail.

Sauf que SMART vient de démontrer avec une rare efficacité que le code du travail ne met pas obstacle aux visées d’une Direction d’entreprise qui entend se réorganiser. Et ce, sans contourner la loi.

Cas d’espèce ? Je ne le crois pas. Les organisations patronales jouent à plein de l’angoisse du chômage pour obtenir un allègement des règles du travail. Nous avons même entendu  le président du MEDEF affirmer que le contrat à durée indéterminée était anxiogène pour les chefs d’entreprise .

Naïfs que nous sommes, nous pensions que ce chef d’entreprise – qui va avec goût du risque - était plus préoccupé par la fiscalité changeante, les règles environnementales (légèrement) plus draconiennes de jour à jour, le poids de la bureaucratie nationale et européenne. Non pas, ce qui rend anxieux le chef d’entreprise, ce serait le CDI. Faut-il y croire ?

Anxiété de façon toute relative au demeurant, puisqu’une embauche sur 5 se fait par contrat à durée déterminée ou intérim .

Aux côtés du Ministre du travail, chaque mois, comme le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger , nous aimerions voir et entendre les responsables des entreprises apporter leurs commentaires sur les chiffres du chômage, ils sont les mieux placés, semble-t-il, pour cela.

Du coup, ils pourraient nous expliquer pourquoi malgré leurs compétences indéniables, et leur sens aigu de l’entreprise, ni le pacte de responsabilité qui a pourtant considérablement allégé les charges sociales (41 milliards, ce n'est pas rien), ni la diminution vertigineuse du coût de l’énergie, ni le rapprochement de la monnaie européenne vers la parité avec le dollar, sans compter l'inflation quasi nulle depuis des mois, ce qui a pour effet de mitiger largement la revendication salariale dans les entreprises, celles qui marchent, ils n’embauchent pas ou si peu….même des apprentis 

Nous pourrions également les écouter sur les actions et prises de risque de leur collègues, ceux de SMART, ou Monsieur PEPY qui veut aussi réorganiser le temps de travail à la SNCF, ou les initiatives de Fernand TAVARES et Louis GALLOIS qui réforment le système des retraites chapeau des dirigeants de PSA sans attendre que le couple MEDEF – AFEP qui vient tout juste d’adapter sur ce sujet des retraite chapeau son « code de gouvernement d'entreprise »  (sic) à la loi Macron, ne lance une réforme approfondie du dit code (en 2016, il n’y a pas urgence, sans doute).

 

 

 

 

 

 

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